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Le Homard Vert
19 novembre 2015

Tout le monde va à St Trop!

Le petit port de pêche cher à Bardot, Vadim et Sagan s’apprête à recevoir en juillet-août 6,2 millions de vacanciers, une statistique en augmentation de 4% par rapport à 2014. La crise larvée n’affecte pas le village peint par Signac et décrit par la grande Colette. Le mythe s’est enrichi du rêve bien vivant de séjourner sur la presqu’île varoise à l’environnement protégé: on ne construit rien, on restaure et on embellit –pas de béton envahissant. Très apprécié des résidents à l’année, à peine 4.000, le maire, Jean-Pierre Tuveri, secondé par l’office du tourisme, a entrepris de promouvoir la cité du bailli de Suffren comme une marque mondiale de tourisme méditerranéen, durable et responsable. En 2014, plus de soixante opérations de promotion et de sensibilisation (workshop) ont été menées dans vingt-quatre pays par Claude Maniscalco, habile directeur du tourisme tropézien. Et ça paie. Comme une multinationale de renommée mondiale Le journal américain USA Today a désigné Saint-Tropez comme la destination la plus romantique du monde devant Bora Bora, Venise, Tahiti, Hawaï et Saint-Barth. De plus, l’office du tourisme du village a reçu le prix de la meilleure gamme de supports imprimés: le magazine Pure Saint-Tropez, les brochures, les guides, les cartes… devant vingt-cinq grandes villes du globe, Val-Thorens en seconde position. La communication du port de pêche aux dizaines de yachts de luxe amarrés devant Sénéquier est conçue et mise en page comme pour une multinationale de renommée mondiale: le maire cherche à étendre la notoriété de Saint-Tropez à l’ensemble des métropoles et des pays développés. Et ça marche. En pleine saison, l’été, les Français ne représentent que 15% de la clientèle vacancière et 30% au Château de la Messardière, leader. En tête, la clientèle en provenance des États-Unis, du Royaume-Uni, d’Italie, d’Allemagne, de Suisse, du Brésil… loin devant les vacanciers russes et des Émirats. En tout, quatre-vingt-cinq nationalités choisissent Saint-Tropez. Un véritable miracle économique. Il reste à dire que les Français ne sont plus en mesure de s’offrir des séjours dans les grands hôtels de la cité, ils doivent se rabattre sur d’autres types d’hébergement: location de villas, d’appartements, de résidences, de villages vacances (VVF)… Il faut consulter la capacité hôtelière de Saint-Tropez pour toucher du doigt la marginalisation de la clientèle française: trois hôtels palaces (248 chambres), quatorze hôtels cinq étoiles (539 chambres), neuf hôtels quatre étoiles (314 chambres), vingt-cinq hôtels trois étoiles (630 chambres) et un seul hôtel deux étoiles avec quinze chambres: les destinations de luxe (1.000 chambres) sont reines. Il n’y a que quatorze maisons d’hôtes, c’est peu, très peu. Château de la Messardière, vue baie de Pampelonne | Château de la Messardière Dans le haut de gamme, les tarifs hôteliers sont parmi les plus élevés de France, trois à quatre fois le prix d’une junior suite au Majestic de Cannes. Au Byblos, historiquement le premier palace légendaire de la cité, la suite (cinquante en tout) atteint 3 600 euros la nuit, l’Hôtel de Paris au centre du village, piscine sur le toit, est à 1 250 euros et trente-huit suites, la Résidence de la Pinède, cinq étoiles, à 2 450 euros, sept suites, le Yaca et Y, cinq étoiles, à 1 695 euros, quatre suites seulement, le Saint-Amour la Tartane, huit suites à 1 500 euros, le Mandala, une suite et un appartement à 3 000 euros, le White 1921 du groupe Moët Hennessy à 890 euros, trois suites… Bref, l’offre haut de gamme est bien là car du 14 juillet au 30 août, la demande croît de jour en jour : Saint-Tropez demeure le passage obligé des «rich and famous», des fous de la mer, du yachting et du «sunbathing». Sur les plages de Ramatuelle, genre Tiki Beach, l’arrosage des baigneuses et des baigneurs au champagne Cristal Roederer n’a plus cours ou si peu: vers le 15 août, apothéose de la saison, délires de fêtards éméchés. «Oui, il faut être riche pour s’offrir des vacances de rêve sur la presqu’île», souligne le patron de ce restaurant de poissons (frais) sur le port, envahi le soir par les badauds et les flâneurs des environs, ébahis par la parade des yachts immatriculés à Panama. À Saint-Tropez, il y a ceux qui vivent sur leurs yachts (taxe de 600 euros la journée perçue par la municipalité), et il y a ceux qui les regardent, espérant être conviés à la fête de la nuit. L’arnaque sur le port est partout, trois boules de glace Berthillon à 18 euros, le prix d’un repas dans un village varois, le tartare de bœuf aux truffes d’été (sans goût) à 110 euros, le Saint-Pierre (frais?) à 45 euros… L’an dernier, un cuistot vendait des spaghettis bolognaise cuits dans le trou d’un mur: on croit défaillir. Le prix des loups, Saint-Pierre, dorades et barbues est intouchable: seuls les intendants et cuisiniers des yachts immobiles viennent s’y approvisionner Songez qu’il y a 800 boutiques à Saint-Tropez, les plus fameuses marques de mode sont implantées autour du port et place des Lices: Dior, Chanel ont des villas avec salons, réceptions et défilés. Il faut voir comment les fringues ont envahi les rues, pas seulement les sandales spartiates, une spécialité locale. La cité du Bailli est devenue un vestiaire permanent, un «décrochez-moi ça» intense qui donne le tournis. Trop c’est trop. Au marché de la place des Lices, le mardi et le samedi, les étalages de bimbeloteries, de bracelets en plastique et autres robes d’été occupent les stands autrefois dévolus aux fruits et légumes, charcuteries et fromages locaux. «Il n’y a plus que deux paysans», indique Loïc de Saleneuve, producteur de fromages, de fruits, de confitures à Colobrière (Var). Désolant.

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Le Homard Vert, c'est le blog d'une petite bête, très bonne, qui regarde le monde essayer de l'attraper pour le dévorer. Il est vert de peur, car le monde autour devient de plus en plus fou... Cela ressemble à de l'actu.
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